Que s'était-il passé? Tout était allé si vite... Si violemment. Les Hosts avaient attaqué le camp, en nombre, déterminé, préparé, capturant tout ceux qu'ils pouvaient et observant quelques chanceux s'enfuir. Évidemment, Sio avait immédiatement cherché Léon, elle savait qu'en cas de problème, c'est vers lui qu'elle devait se tourner et elle l'avait trouvé... En le voyant, la belle s’était imaginé que tout était bon, qu'ils allaient réussir à s'enfuir, ensemble, qu'il la protégerait et qu'ils s'entraideraient, comme lors de leur première rencontre. Ça ne pouvait pas se passer autrement, parce qu'il était là. Mais rien ne s'était déroulé comme elle l'avait imaginé. Ses souvenirs sont flous, elle n'est pas même sur de ce qui c'est réellement passé , la seule chose dont elle se souvient, c'est la douleur, les cries, la peur, puis finalement son cœur qui bat trop fort contre sa poitrine, alors qu'elle cours à travers les tunnels, seule, sans lui. Ils avaient été attaqué, puis séparé, embarqué chacun de leur côté par la panique ambiante et par leurs blessures, car elle le savait, elle était blessée, elle souffrait atrocement, et n'avait qu'une envie, tomber à terre et hurler de toutes ses forces, mais elle ne pouvait pas, pas si elle voulait survivre et désormais, ce n'était pas seulement SA vie qu'elle devait protéger.... Siobhan avait continué, jusqu'à réussir, par une chance insolente, à sortir de ce piège à rats, se retrouvant adossé à un arbre, une arme à la main, l'autre sur sa jambe, la douleur se faisant de moins en moins tolérable. Elle avait vu les médecins faire plus d'une fois, alors dans un éclair de génie qu'elle n'était pas sur d'avoir de nouveau, elle déchira sa robe désormais souillée par la saleté, puis passa le bout de tissu au-dessus de son genou, là où elle avait été blessée. Les larmes coulaient sur son visage recouvert de poussière, la belle était effrayée, perdue, instable, comme si elle présageait le pire, comme si elle savait ce qui allait se passer, sans oser l'admettre. Puis il était apparut. Un homme avait surgi de nulle part, blessé, tout comme elle, ce n'était malheureusement pas Léon et la Roseburry semblait tellement perdu qu'elle tira, sans même se poser de question, apeurée, surprise.

Il lui fallut quelques minutes pour comprendre son geste... Alors, elle ouvrit les yeux et se dirigea lentement vers le corps sans vie de cet inconnu. Sio' ignorait son nom, toutefois elle connaissait son visage, elle l'avait déjà croisé, sans intéresser plus que ça à sa vie... tout ce qu'elle savait, c'est qu'en théorie il n'était pas un host, mais un simple humain qui tentait de sauver sa vie, tout comme elle. Le choc fut brutal. La jeune femme tomba à terre, les mains sur son visage, retenant un cri, ne pouvant en faire autant avec ses larmes... Elle venait de tuer quelqu'un. Un innocent. Peut-être avait-il une femme qui l'attendait? Un enfant? Une vie à lui, une vie qu'elle venait de lui prendre, une vie qu'elle venait de détruire. Cette vérité fut insupportable pour la belle, qui se mit à vomir, totalement retournée par son acte, sa blessure à la jambe ne la rendant que plus fragile encore, autant physiquement que mentalement. Cela dit, cette blessure n'était rien à côté de la douleur qu'elle ressentit à cet instant, une douleur au ventre, une douleur comme elle n'en avait jamais connu, elle ne put s'empêcher de laisser échapper à nouveau un cri, tentant rapidement de l'atténuer en posant sa main sur ses lèvres. Elle était punie. C''est ce qu'elle se répétait tout en rampant jusqu'à cette forêt. Siobhan savait ce qui se passait, elle le savait, mais elle n'osait pas regarder, elle ne pouvait pas. Pourtant, elle sentait bien ce liquide vital couler le long de ses jambes nues, elle savait ce que ça signifiait...  



« Je ne sais pas si je mets la robe rouge, rose, bleu ou la jaune, le jaune me va bien au teint tu crois pas? » C'était une Siobhan souriante que l'ont retrouvé, debout devant son miroir, attrapant des robes sur son lit et faisant mine de les essayer pour voir laquelle pourrait lui allait le mieux. Elle adorait les robes, elle ne portait presque que ça, en été comme en hiver, c'était presque sa passion en un sens, avec les sacs et les chaussures, et bien sûr ses études. La belle vivait sur une rente plutôt confortable, elle ne devait se soucier de rien, simplement suivre ses cours et vivre sa vie de jeune adulte. Ses parents ne venaient que quelques fois par an lui rendre visite, ils vivaient à Johannesburg, sa ville natale et leur travail étaient plutôt prenants. Son père était un juge intransigeant, prêt à tout pour rendre justice et sa mère, une politicienne, tout aussi déterminée à protéger les plus démunis contre la cruauté de certains. Leurs valeurs et leur combat avaient obligé leur fille à vivre une enfance plutôt singulière, presque constamment enfermée entre les quatre murs de leur « palais », protégé par une ribambelle de garde du corps, elle ne se déplaçait jamais à pied ou seule, elle était traitée comme une princesse, prisonnière d'un château doré, ce qui n’entamait en rien sa joie de vivre. C'était à cette époque qu'elle avait découvert la mode, grâce à ça , elle pouvait se libérer, puisque c'était la seule chose que personne ne contrôlait à sa place. Elle pouvait porter ce qu'elle voulait, acheter ce qu'elle voulait sans que quiconque ne dise quoi que ce soit. Peut-être était-ce naïf et superficiel, mais elle n'était qu'une enfant à l'époque et cette idée de liberté grâce à de simples vêtements resta gravé dans sa mémoire comme une vérité absolue. Puis la vraie liberté était arrivé, lorsqu'elle décida de quitter l'Afrique du Sud pour les États-Unis afin de poursuivre ses études. Plus de gardes de corps, plus de prison dorée, simplement la liberté, son sourire et son envie de croquer la vie à pleine dents.

Alors qu'elle se remémorait ses instants passés, cette joie d'être libre et de se sentir tellement en sécurité malgré tout, la belle ouvrit les yeux doucement, comme si elle se réveillait d'un long et pénible cauchemar. Surement s’était-elle évanouie à cause de la douleur, en tout cas, elle était à présent entourée d'arbre, allongée par terre, incapable de savoir dans quelle direction aller, ni même s’il y avait vraiment un « bon chemin » à prendre. Après tout, la cohorte avait été attaquée, Léon avait disparu, où pouvait-elle donc bien rentrer maintenant? Y avait-il seulement des survivants? Peut-être. La seule chose qu'elle savait, c'est que son bébé n'en faisait pas partie. Lui il était mort. Brutalement, sans qu'elle puisse y faire quoi que ce soit et surement par sa faute, car oui, Siobhan, à cet instant, était persuadé que si elle venait de perdre son enfant, c'était uniquement parce qu'elle avait pris la vie d'un innocent. Elle n'était pas foncièrement croyante, pas pratiquante en tout cas, et pourtant, elle semblait persuadé que dieu la punissait. À cette pensée, elle se leva, tentant de tenir debout, ce qui ne fut pas aisé. Il lui fallut quelques minutes pour y parvenir, alors elle observa les alentours, toujours les yeux rougis par ses pleurs, puis elle avança, aux hasards, suivant le bruit d'une rivière qu'elle semblait entendre au loin. Peut-être n'était-ce que son imagination, cela étant, elle n'avait pas vraiment d'autres pistes à explorer.

La jeune femme marcha un petit moment, lentement, effrayé, elle avait laissé son arme tomber près du cadavre de l'inconnu qu'elle avait abattu, désormais, notre demoiselle était sans défense, affaiblie, accablée, pour ne pas dire détruite. Finalement, elle tomba nez à nez avec une petite rivière, la chance le souriait enfin. Au début, Sio' décida de simplement boire quelques gorgés tout en essayant de nettoyer son visage... Puis son regard se posa sur ses jambes, ensanglantées... Preuve irréfutable que désormais, l'enfant qu'elle attendait, n'existait plus. Elle décida alors d'entrer dans cette rivière, l'eau lui arrivait à peine aux genoux, mais elle devait à tout prix faire disparaître ses traces, comme si cela pouvait changer la réalité, faire que tout ce qui s’était passé n'était qu'un cauchemar... La Roseburry commença donc à se nettoyer, frénétiquement, prête à tout pour que plus aucune preuve de son crime ne survive... Une fois sa besogne faite, elle sortit de l'eau, s'adossa à une sorte de rocher, les bras croisés, frigorifié, catatonique, les yeux dans le vide, perdu dans un monde surement meilleur que celui dans lequel elle se trouvait maintenant.



Un monde du passé, de l'époque où elle n'était qu'une étudiante en médecine, interne à l'hôpital. Elle n'avait presque pas de vie sociale, trop prise par son travail, elle enchainait les heures de boulots avec plaisir, car à l'hôpital, elle se sentait plus vivante que jamais. Étrangement, le souvenir principal qui lui revint à l'esprit à cet instant, ce fut ses retrouvailles avec Danny. Des retrouvailles made in Siobhan, puisqu'elle l'attaqua avec un sifflet anti-agression alors qu'il s'était approché d'elle simplement pour la saluer. Ils étaient dans le parking de l'hôpital, un parking particulièrement glauque qui avait toujours eu le don d'effrayer la demoiselle, cette dernière se baladait avec un taser , une lampe de poche ultra puissante et ce fameux sifflet anti-agression. Allez jusqu'à sa voiture était un véritable parcours du combattant pour elle. La belle frôlait les murs, sursautait au moindre petit bruit et même une fois enfermé dans son véhicule, elle préférait vérifié sa banquette arrière et même son coffre avant de démarrer. Trop traumatisé par les films d'horreur que ses amis l'obligeaient à regarder. Ce jour-là n'était pas différent des autres, Sio' avait enchainait trente-six heures de gardes, épuisé, elle voulait rentrer chez elle et Danny était apparu, au détour d'un poteau, trop brusquement pour ne pas la surprendre. Elle ne l'avait pas tout de suite reconnu, parce qu'il avait changé tout simplement, il faut dire qu'elle l'avait connu alors qu'elle n'était qu'une enfant, lui n'était alors qu'un simple jeune garde du corps, ancien membre des Marines, prêt à tout pour la protéger. Elle ignorait qu'il vivait désormais aux États-Unis, mais, elle se doutait qu'il était surtout là pour veiller sur elle, de loin, tel un ange gardien des temps modernes. Elles s'étaient toujours sentis tellement en sécurité avec lui... Il était fort, courageux et prêt à tout pour elle. C'est surement pour ça qu'elle s’était tant rapprochée de Léon... Ils se disputaient souvent depuis son arrivée à la Cohorte, c'était certain, et il y avait de quoi, mais il restait la personne vers qui elle voulait se tourner lorsqu'elle était en danger... Le visage de Danny disparut petit à petit, laissant place à celui de Léon et c'est à cet instant qu'elle sortit de ses pensées, reprenant un semblant de lucidité, laissant à nouveau les larmes perlaient sur son visage, comme si elle ne savait faire que ça. Siobhan s'en voulait d'être si pathétique, elle s'en voulait d'avoir commis ce crime horrible, elle s'en voulait d'avoir perdu leur bébé, alors qu'elle avait tant clamé ne pas être prête pour être mère... Elle était perdue, entre le désespoir et la culpabilité, incapable de se battre à nouveau pour sa survie... Elle abandonnait, tout simplement.