2000. SUMMER.
Allez Ellie, reprends une taff. Je secouais la tête, attrapant le joint des mains de ma meilleure amie. Selene et moi avions toujours été proches. Depuis le moment où j'avais déménagé de Manchester pour le travail de mon père. D'une petite fille timide dans l'ombre de ses parents, j'étais passée à l'adolescente affirmée et sûre d'elle que j'étais maintenant. Ce soir-là, en plein dans les vacances d'été, nous étions un petit groupe de lycéens du côté "rythmé" de la ville, là où il y avait de l'ambiance quoi. Nous allions souvent faire des soirées là, simplement pour sortir, danser et oublier. Après avoir aspiré, je tendais le joint à Ethan, à ma gauche. Selene me lança un regard suggestif, puis me prit la main. Elle m’entraîna sur la piste de danse, et plus rien ne comptait. Je n'étais pas une fille à problème, mais mes études étaient difficiles, et j'avais eu du mal jusqu'à présent à ne pas sombrer dans la déprime. Et puis, je n'avais jamais vraiment été du genre à sortir avant, plutôt bien protégée par mes parents. Une nouvelle chanson se lança tandis que je serrais en riant Selene dans mes bras. La foule revint vers nous, et la soirée reprit de plus belle. Tout à coup, Jason se précipita vers la sono et arrêta la musique. Des cris de plainte se firent entendre. L'alcool semblait m'embrouiller la tête, alors je ne fis que sourire bêtement. Ses mots semblaient paniqués, mais je ne les entendais que moyennement, comme si un certain bourdonnement avait empli mes oreilles. Des mots confus donc, une panique flottait dans l'air. Tout le monde s'activa brusquement, rangeant les bouteilles, les verres, passant un coup d'éponge sur le plan de travail inondé de tequila. Je me souviens avoir demandé au premier à passer devant moi ce qu'il se passait, et à cela, il a répondu que la police était là. Malheureusement, le temps de réagir, et il était pour moi trop tard. Certains s'étaient échappés par la porte fenêtre donnant sur le jardin, la plupart étaient cachés. Selene était montée à l'étage, mais moi, moi j'étais restée là, en plein milieu du salon, alors que la police entra dans la maison. Je n'étais pas la seule, rassurez-vous. Les flics nous embarquèrent, surtout parce qu'ils ont eu la preuve de la drogue et de l'alcool utilisé pour les gens non majeurs. Je passais la nuit en cellule de dégrisement, jusqu'à ce que mes parents viennent me chercher. Le regard de mon père à cet instant... Jamais je ne l'oublierais. Ma mère était au bord de la crise de panique, alors que lui était d'un calme olympien. Et c'était justement ça qui faisait le plus mal. Les longues minutes dans la voiture resteront à jamais dans ma mémoire. Tu te rends compte de ce que tu as fait, Ellie? Cela va te t... Le choc. Le choc avait été si brutal que l'air avait été expulsé de mes poumons. Je n'avais pas même eu le temps de crier, pas même eu le temps d'avoir peur. La voiture se retrouvait sans dessus dessous, à tourner tout en glissant sur la route. Elle finit par heurter un arbre, immobilisant son parcours déroutant, et je perdais connaissance. A mon réveil, l'atmosphère était chaude et nuageuse. Quelque chose gouttait sur les pavés de la route, mais j'ignorais ce que c'était. Ouvrant les yeux péniblement à cause de la lumière d'un réverbère, je remarquais que le siège de ma mère était reculé sur ma jambe. Je tentais de me redresser, mais ma jambe était coincée. Un gémissement de douleur s'extirpa de ma gorge, alors que je me débarrassais des bouts de verre qui me recouvraient. Le souffle court, je toussais, et je remarquais le sang sur ma chemise. La panique m'envahit lorsque je tâtais ma tempe, trempée d'un liquide visqueux. Je tentais d'appeler à l'aide, d'appeler mes parents, mais de ma voix enrouée ne sortit qu'un grognement informe. C'est à l'hôpital qu'on m'apprit que mes parents étaient décédés sur le coup. Et la mortelle malédiction qui m'entourait ne faisait que commencer.

2012. SPRING.
Que se passe-t-il? Descendant de l'escalier de notre deux pièces en plein centre de Manhattan, j'interrogeais mon frère, le regard planté sur l'écran de télévision. Il ne me répondit pas, et il décida simplement d'attraper la télécommande et de monter le son de la télévision. Me rapprochant, j'écoutais avec attention. Les signes de la rubrique spéciale FLASH INFO étaient visibles partout. Des vaisseaux aliens? Des extraterrestres? Je m'avançais vers lui, prenais la télécommande et changeais la chaîne. Rien n'y faisait. Ce n'était définitivement pas une blague. Abasourdie, je jetais un regard vers mon frère aîné. Qu'allions-nous faire? Henry... Ma voix s'éteignit lorsque je compris que rien de ce que je pourrais dire ne ferait avancer la situation. Les aliens étaient parmi nous. Il n'avait pas fallu longtemps à mon frère pour prendre le contrôle de la situation. Nous étions très soudés, depuis le jour où nous étions devenus orphelins. Il m'avait nourrie, logée, et nous ne nous étions plus quittés. Il avait toujours été là pour moi, et j'appréciais sa présence et ses conseils. Très vite, il m'avait ordonné de préparer mes affaires, le stricte nécessaire. Lorsque je lui avais demandé pourquoi, il m'avait répondu que nous partions. On ne peut pas rester, Ellie. Ca va devenir le chaos. Et sur ce point, il avait raison. La nouvelle n'avait retentit que depuis quelques heures, mais déjà les gens étaient dans les rues, fuyant, pillant. Les magasins avaient été saccagés, les bien cassés, les vitrines brisées. Le chaos s'installait et l'apocalypse commençait. Munie d'un sac à dos, je suivais mon frère qui nous frayait un chemin. Soudain, je me souvenais. Selene. J'attrapais mon frère par l'épaule. Selene, il faut aller la chercher! Il secoua la tête, me disant que c'était trop dangereux. A mon tour, je fronçais les sourcils. Je ne la laisse pas! Il se retourna, et nous courûmes jusqu'à son appartement. Une fois arrivés, nous remarquions que la porte était enfoncée... Inquiète, je la franchissais, regardant autour de moi. Tout était sans dessus dessous, les fenêtres ouvertes, le frigo était vidé, les meubles renversés, les tiroirs tirés. Une curieuse sensation de malaise m'envahit. Henry se dispersa derrière moi, passant dans une pièce adjacente. Je me précipitai dans l'escalier, montant quatre à quatre les marches. Arrivée en haut, je ralentis, observant les lieux. Mon coeur battait la chamade, m'empêchant presque de respirer. Je saisis une lampe, peu rassurée dans cet environnement détruit. Soudain, à l'ouverture d'une porte, une ombre me bouscula, et j'en lâchais mon arme. Il s'agissait d'un homme, le visage fatigué comme en témoignaient les longues cernes autour de ses yeux. Il me cria de m'écarter, et je vis avec lui une petite fille terrifiée. Ses grands yeux bruns se posèrent sur moi. Je m'éloignais d'un pas, levant les mains, lui demandant où était la jeune femme qui vivait ici. Son air étonné me montra qu'il ne savait pas de quoi je parlais. Henry se précipita à mon secours, mais il s'arrêta net lorsqu'il vit que l'homme tenait dans ses mains un couteau ensanglanté. Il partit avec moult précautions, et je me tournais vers Henry. Dans son regard, je lus que quelque chose n'allait pas. Je sentais la panique me comprimer la gorge alors que je tentais de le pousser pour descendre. Il se plaça devant moi, m'arrêtant avec des paroles douces. Je l'écartais avec violence, sentant les larmes me monter aux yeux. Descendant les marches, je sautais les trois dernières. C'est alors que je compris. De cet angle, l'appartement semblait différent. Une porte de placard était entrouverte, la table à repasser tombée sur le sol. M'approchant doucement, Henry ne me laissa entrevoir qu'un poignet bleu et tordu, ainsi qu'un bracelet que je reconnaissais sans peine. Je n'eus pas le temps de m'effondrer, car après un bref contact, Henry m'entraîna de nouveau sur le chemin de la sortie.

2012. WINTER.
"Okay okay okay, alors, et celle ci :"I was born with the wrong side, in the wrong house, with the wrong ascendency". Elle fredonna la chanson, et je souriais, alors que Jules s'exclamait en faisant un bond. "Depeche Mode, Wrong. Cette chanson était véritablement une bombe!" Amelia pouffa puis soupira, lui ébouriffant la tête, indiquant qu'il n'était pas drôle car il trouvait toutes les réponses. Il ria un moment, puis se vanta d'avoir une culture musique infaillible. Elle le poussa gentiment de l'épaule. "Tout va bien?". La voix d'Henry me parvint. Je tournais la tête vers lui, poussant un petit soupir. Quelques mois avaient passé depuis que nous avions quitté New York. Les nouvelles, le peu de nouvelles que nous avions eues étaient mauvaises. On indiquait des camps entiers d'aliens, et de ce que l'on appelait à présent les Hosts. D'une certaine façon, des aliens prenaient possession des corps humains, faisant de nous de leurs. Cette pensée était réellement traumatisante. Nous n'avions pas de moyen de les déceler. Nous allions devoir en trouver un, et vite. Je secouais la tête, replaçant mon bonnet hivernal sur mes oreilles. La chaleur qu'il me prodigua me fit du bien, et je repris la route à travers la neige épaisse. La nuit tombant, nous décidions de nous arrêter au premier endroit que nous pourrions trouver. Amelia et Jules avaient croisé notre route plusieurs jours auparavant. Nous leur avions annoncé que nous allions retrouver de la famille à Cincinnati. Décidant que l'union faisait la force, nous faisions route commune. Tout aurait pu sembler normal, et presque attrayant. Si on oubliait que le monde touchait à sa fin. Une fois abrités, nous partagions au coin du feu quelques réserves de boite de conserve que nous avions prises à Manhattan en partant. Contrairement à tout à l'heure, l'ambiance était morose, comme si dans notre silence passait une sorte d'acceptation de notre sort. Henry et moi voyagions pour retrouver notre tante, qui vivait à Cincinnati. Lui semblait avoir suffisamment d'espoir pour y croire, mais moi, je ne savais pas si je pouvais me le permettre. La mémoire de Selene était encore bien présente, et j'avais tendance à me méfier de tout à présent. Jules et Amelia allaient se marier, m'avaient-ils confié un jour. Jules se pencha vers moi, me tendant une cigarette. Je l'acceptais avec plaisir, consciente du sacrifice que cela lui demandait: les cigarettes étaient rares, et se vendaient contre toutes sortes de services, maintenant. Je le laissais l'allumer, et j'aspirais une bouffée, penchant la tête en arrière sur le mur de notre petite maison. Le "repas" se passa sans encombres, et au bout d'un moment, chacun partit se coucher. Je m'allongeais dans ma couverture, m'enrobant du mieux que je pouvais avec le froid hivernal. Le sommeil ne tarda pas à venir, malgré toutes les pensées qui me hantaient. Soudain, un frisson me réveilla brusquement. J'ouvris les yeux. La lumière lunaire filtrait encore par les volets défoncés, ce qui me laissait à penser que la nuit n'était pas terminée. Un bruit attira mon attention et m'empêcha de sombrer dans le sommeil. Je regardais autour de moi, plissant les yeux pour tenter de distinguer une forme étrange. Élancée, svelte, elle était penchée sur le corps d'un de mes compagnons qui dormait. Elle se retourna, et le pire de sa silhouette était les yeux. Lumineux comme si une lumière se cachait derrière, ovales et globuleux et pourtant si pâles. L'angoisse me transperça, immobilisant mes membres, m'empêchant de reprendre mon souffle. Un autre s'approcha de mon frère qui dormait. Je me relevais brusquement, criant son nom. Un cri suraigu accompagna le mien, et Henry se redressa brusquement. Il sortit son revolver de sous son oreiller et tira, mais manqua sa cible. Je regardais autour de moi, à la recherche d'une arme. Amelia et Jules avaient disparu, laissant leurs sacs. Me faisant violence, je me précipitais jusqu'à leur couche, fouillant avec frénésie dans le sac. Je trouvais un pistolet léger et je le pointais sur l'alien. N'hésitant plus, je poussais la détente, mais l'arme ne se déchargea pas comme elle aurait du. Brusquement, mon frère était inapte à se défendre, et alors qu'ils emportaient son corps inerte, je m'élançais vers eux, attrapant un bâton de bois. Je l'assaillis sur l'envahisseur, sans succès. Le bâton ne le toucha pas et il s'était déjà retourné pour m'arrêter. D'un seul coup de bras, il m'envoyer valser et je tombais lourdement sur une commode en bois, la cassant en deux. Le choc me laissa pantoise. Mes yeux voulaient se fermer, et je clignais des yeux, voyant par séquences mon frère être emmené par les aliens. A mon réveil, j'étais seule, et le soleil étaient hauts dans le ciel. Une seule question me taraudait: pourquoi lui, et pourquoi pas moi? Etaient-ils trop peu nombreux pour transporter mon corps en plus du sien? Pourquoi? C'est en repartant de la maison que je me jurais de retrouver mon frère aîné. Et c'est ainsi que je croisais le chemin de la cohorte, qui se dirigeait justement vers Cincinnati. Mon voyage ne faisait que commencer.

Bonjour, moi c'est Marion, j'ai 20 ans (ouah la vieille!) et j'ai fini mes deux années de prépa scientifique ce mois-ci, avec une entrée en école d'ingénieur le mois prochain! Je vous aime déjà, et je sens que je vais bien m'amuser ici :D ♥