Kellian,

Le soleil se lève à peine sur un nouveau jour. Je prends un stylo et du papier pour t’écrire ces quelques mots, te dépeindre ma vie depuis l’Invasion. Six mois, déjà. Le temps a passé si vite… et si lentement à la fois.

J’ai l’impression qu’hier encore, tu étais près de moi. Mais hier pourtant, j’ai tué un enfant. Un garçon d’à peine quinze ans, qu’un alien venait de prendre. On s’est tous regardés, faisant cercle autour de lui, et chacun de nous savait qu’il fallait le tuer. Même si la plupart des gens ici avaient déjà tués, ils ne pouvaient se résoudre à commettre un tel acte sur un gamin que tous nous avions connus, et aimés. Alors, comme toujours, j’ai fait ce qui devait être fait. Je n’ai pas tué un enfant, j’ai tué un Host.

Je me souviens du jour où ils m’ont trouvé. Quatre loubards taillés comme des armoires à glace, bardés de cicatrices et de tatouages. Ils m’ont chassée et débusquée, dans un ancien squat sale de Détroit. A quelques rues de l’endroit où toi et moi, on s’est rencontrés. J’ai cru qu’ils me tueraient, mais l’un d’eux a sorti une feuille polycopiée de sa poche. Dessus, une dizaine de photographies en noir et blanc. Dont la mienne, sous quelques mots tracés à la hâte : « Andy, 27 ans, vétérinaire. A retrouver, vivante ». Mon cœur a cessé de battre un instant. J’ai repensé à ma famille, dont je n’avais aucune nouvelles depuis l’Invasion, vingt jours plus tôt. Mes parents, ma sœur, je ne savais pas où ils étaient. Andy, il n’y avait que mon frère pour m’appeler comme ça. En prison depuis six ans. Les quatre ex-taulards m’ont prise avec eux, et quelques heures plus tard je retrouvais la seule personne que je ne pensais jamais revoir : Aiden, mon grand-frère. Aux yeux de toute notre famille il était tombé en disgrâce depuis sa condamnation.

4 juillet 2012, fête nationale, il était le chef des évadés de la Grande Centrale de Détroit. Pour lui, comme pour tant d’autres, l’Invasion avait été leur seule chance de prendre un nouveau départ. Comme lorsque, à la mort de maman, j’ai dû quitter New-Delhi, mon arrivée aux Etats-Unis a été un rebondissement incroyable dans ma vie. Retrouver Aiden, Olivia, papa et sa nouvelle femme a été pour moi un soulagement. Après vingt jours passés seule dans un Détroit dévasté, j’étais heureuse de retrouver la compagnie des Hommes. Même s’ils n’étaient pas les plus honnêtes, ni les plus intègres que l’on puisse rencontrer. Et que je n’ai jamais été très à l’aise pour nouer des liens, c’est plus facile vu les circonstances. Les gens sont plus méfiants, mais ils ont davantage besoin les uns des autres. Comme il y a peu de médecins et d’infirmiers, on m’appelle souvent quand il y a des blessés. Mais ce qui arrive le plus fréquemment, ces derniers temps, ce sont les tentatives de suicide ratés. Les gens perdent espoir.

Quand j’aurais terminé cette lettre, je quitterais le Michigan pour te retrouver. Je vais entreprendre le voyage de Détroit à New-York, dans l’espoir de te revoir Kellian. Ils disent, autour de moi, que les Hosts ne peuvent pas avoir de sentiments. Qu’ils ne peuvent pas haïr. Qu’ils ne peuvent pas aimer. Mais pourquoi m’avoir avoué ce que tu étais, si tu ne m’aimais pas ? Si tu ne m’aimais pas, au moins un tout petit peu. Je dois savoir. Je dois savoir Kellian ! Si pendant ces trois ans où nous avons été ensembles, tu me mentais sur tes sentiments. Tu devais savoir que l’Invasion aurait lieu, et tu devais savoir que les Hosts avaient pour projet de nous détruire. Et quelque part, je devais le savoir aussi. Dès l’instant où tu m’as avoué ce que tu étais, je devais bien me douter que tu ne serais pas le seul Host sur la Terre. Parfois, je me dis que j’étais peut-être la seule à pouvoir empêcher tout ce gâchis, toutes ces vies volées. Et je n’ai rien fait. Une seule fois, j’ai mis de côté ma raison pour laisser parler mon cœur. Voilà le résultat. J’essaye de me convaincre que personne ne m’aurait cru. J’essaye de me convaincre que tu m’aimais vraiment.

Je partirais seule, avec Joy. Joy est un grand danois auquel je me suis attachée. Mon frère l’a retrouvé quelques jours après l’invasion, à côté de sa mère et d’une portée de chiots mort-nés. Joy est un survivant, comme moi. Garde du corps insignifiant face à la puissance des Hosts, mais réconfort immense, Joy veillera sur moi pendant mon voyage. J’ai confiance. J’ai appris la survie avec les meilleurs : magiciens, dompteurs, acrobates, … on ne se douterait pas à quel point grandir dans un Cirque itinérant à travers les Etats-Unis, est d’un grand secours pour moi aujourd’hui. Dans mon sac, quelques feuilles de dessin et mes aquarelles, je n’ai pas réussi à m’en séparer. Je me dis souvent que grâce à l’Art, nous resterons Humains malgré tout. J’ai toujours le portrait de toi que j’avais fait, un jour. Je me laisse aller à un peu de nostalgie parfois, je le regarde et je me rappelle que je t’aime. Même si tes frères ont détruit notre Terre et les miens.

Peut-être un jour liras-tu cette lettre. Si tu la trouves sur quelqu’un, tue-le je t’en prie. Voir Aiden devenir un Host serait pour moi la pire des déchirures. Mais j’espère pouvoir te dire toutes ces choses moi-même, j’espère te retrouver. Et s’il s’avère que tu ne m’as jamais aimé, je te demanderais de me tuer, moi-aussi. Dans ce monde dévasté, je ne pourrais vivre sans ton Amour.

Cassandra

Animals ♥
C’est là-bas que l’aventure a commencé pour moi. Et c’est ici qu’elle va continuer parce que je ne vous lâche plus ! *gnugnut le groupe*
Alors je suis une schtroumfette mangeuse de dragons, j’ai un certain âge (déjà ! Parce que de mon temps… ) et je suis une RP-addict depuis… cinq ans ?!